QUELQUES REFLEXIONS
SUR L'EVOLUTION
DES INSTRUMENTS A ANCHE.
Muses, vesses, cornemuses, chalemies, ........
Les instruments à anche apparaissent en nombre dans l'iconographie médiévale; il n'est pas toujours évident de voir en quoi consiste leur anche. Voici donc quelques remarques, qui s'appuient plus sur une pratique et sur des observations personnelles que sur une étude rigoureuse.
Ces réflexions ne concernent que les instruments utilisés dans le monde occidental.
Dans l'Antiquité
Du V° au XII° siècle
Au XIII° et XIV° siècle
Fin XIV° et XV° siècle

Cliquer sur les illustrations pour en savoir plus.


DANS L'ANTIQUITE

L'iconographie fait la part belle à l'instrument appelé "AULOS" par les Grecs, TIBIA par les Romains.

Plusieurs sortes d'aulos apparaissent :
certains avaient peut-être une anche simple,
dégagée dans un roseau.

En Sardaigne, dès le IX° s.av.J.C., on trouve une variante à trois chalumeaux : le LAUNEDDAS
Cet instrument est encore joué aujourd'hui.
Statue votive en bronze
sans doute d'origine punique
9°S. av.J.C.

Cependant, l'Aulos "noble" était  un instrument à anche double.

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Des recherches récentes montrent que les aulètes les plus réputés, réclamés à travers le monde grec, utilisaient des instruments et des anches doubles très élaborés; celles-ci étaient peut-être proches de celles des bassons actuels.

Mais il devait exister des instruments avec une anche double  rudimentaire : un simple roseau écrasé et à peine taillé. Le DUDUK arménien est peut être une survivance de cet instrument.

Cet aulos était généralement "bicalame": il comportait deux chalumeaux et donc deux anches. 
Pour en faciliter le maintien, les musiciens le maintenaient par une sorte de masque: le "phorbeia".

Les Romains n'ont fait que reprendre l'aulos en le nommant : TIBIA.
Il en existait plusieurs tailles. Des bagues et des mécaniques complexes à anneaux  furent peu à peu ajoutées.
Pour en savoir plus!

DU V° AU XIII° SIECLE

 Avec le triomphe du christianisme, les Tibiae semblent disparaitre.
Par contre, il est  probable que des instruments à anche simple, plus rudimentaires,  aient été utilisés car nous les retrouvons alors :

Dans la sculpture romane:

L'archéomusicologue Lionel Dieu a repéré en France un certain nombre de représentations d'aérophones. Une observation détaillée montre que ceux-ci sont  ce qu'il appelle des MUSES, c'est à dire des chalumeaux à anche simple.
Une étude novatrice sur ces instruments a  été publiée :
DIEU  Lionel - CABIRAN Pierre-Alexis : article sur les muses médiévales
Histoire medievale : n° 45, octobre 2003

 

Dans les enluminures de manuscrits:
Là aussi, la plupart des instruments à vent  semblent être des muses ainsi définies.

Les instruments où l'anche est contenue dans une poche commencent à apparaître dans l'iconographie du XIII° s.

 
 
 
 
La VESSE
La CORNEMUSE
Le CHALUMEAU
à CORNE 
Le CHALUMEAU
à COLOQUINTE

L'archéologie confirme!
Les fouilles archéologiques menées ces dernières années sur certains sites du XI° siècle ont permis de reconnaître ces instruments. Ainsi à Charavines (Isère), Lund (Suède), Britsum (Pays-bas) ou en Pologne.

RECONSTITUTIONS DE MUSES
par P.A. CABIRAN

Par contre les instruments à anche double
n'apparaissent pas du tout pendant cette période.

Certes des enfants ont  pu "bricoler" des "muses de blé".
Certes quelques illustrations sont approximatives.
Certes une anche double peut se cacher dans un sac ou une coloquinte!

Mais ni la sculpture romane, ni les enluminures ne font référence
à un instrument à anche double et à perce conique.

Oubli des illustrateurs?
Curieux sur une période de six siècles au moins!

Disparition provoquée par l'arrivée d'une nouvelle structure sociale et religieuse au V° et VI° siècle?
Chasse à un instrument considéré comme trop lié  aux rites païens, aux orgies...?
Difficile à prouver!
Mais on trouve le même phénomène pour les instruments en métal!

L'absence de ces instruments est pourtant bien réelle et contraste avec leur omniprésence à partir du XIII° siècle.

 
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Révisé le 18/05/2007