Les percussions

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LES PERCUSSIONS

La sculpture romane propose des petits tabors portatifs. Ils sont parfois munis d’une bande vibrante et prennent alors le nom de timbre.

Tambourin n’est pas un terme roman. Il désigne un cadre muni de cymbales connu à la Renaissance sous l’appellation tambour de Basque.

Les flûtes et les muses

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LES FLUTES ET LA MUSE
Pendant la période romane, on relève le frestel (flûte de pan), des flûtes droites cylindriques qui paraissent être fabriquées en os, jouées à deux mains, ou une seule pour former le couple flûte-tabor, et des instruments à double rangées de trous, identifiés par Lionel Dieu étant des muses. Il s’agit en réalité, d’instruments à anches simples pouvant être recouvertes d’un couvre-anche en corne.
Rappelons qu’organologiquement, la flûte se définit par le partage du souffle sur un biseau.

Pierre-Alexis Cabiran a reconstitué un certain nombre de ces instruments :
Les frestels
Les muses

Les psaltérions

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LES PSALTERIONS

Psalterion est un terme qui désigne, dans la Vulgate, indifféremment les instruments à cordes destinés à jouer les psaumes (psalmos, psalmus). Conscient du fait, les copistes le nomment aussi salterion et sautier. Il constitue, aujourd’hui, une appellation générique pour la famille des cithares sur table, du canon médiéval aux diverses formes de cymbalum, qânûn et tympanon.

Dans le deuxième quart du XIIe siècle, il apparaît dans le contexte iconographique de l’enseignement musical.
Les textes du XIIIe siècle le nomment canon qui signifie la mesure (kanon) en grec, confirmant son usage didactique. Ce terme s’applique plutôt à la forme trapézoïdale, micanon à la version triangulaire.

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Bien qu’il soit possible qu’une cithare sur table à 10 cordes, de forme quadrangulaire, étroite et allongée, ait été pratiquée marginalement chez les romains (cf. Christophe Vendries), aucune figuration crédible de cet instrument ne nous est parvenue avant les années 1140 ( première apparition à Chartres, portail royal).

Exception faite de la rote (est-ce un psaltérion ?), on ne trouve depuis le Haut Moyen Age jusqu’à l’érection du portail central de la Basilique de St. Denis compris , aucune figuration organologiquement crédible de psaltérion (ca. 1140).

Les reproductions successives d’illustrations hermétiques issues de la “pseudo lettre de Jérôme à Dardanus” n’autorisent, malgré six siècles de répétitions, à aucune conclusion d’ordre organologique. Opposant le psalterium (dont la caisse de résonance est tournée vers le haut) à la cithara (qui résone par le bas) ces images, comme les commentaires qui les accompagnent n’évoquent que des mythes et des symboles obscurs, y compris pour leurs auteurs. Tout au plus, les schémas qui illustrent ces exégèses sophistiquée du Psaume 150, pourraient-ils représenter le souvenir confus et lointain d’instruments Antiques, parfaitement étrangers aux pratiques musicales de l’époque.

psaltver.jpgD’autre part, l’hypothèse de l’origine arabe des psaltérions semble aujourd’hui totalement dénuée de fondements documentaires. Nous n’avons recensé à ce jour aucun témoignage de l’existence de cithares sur table dans le monde musulman avant les fresques de la chapelle Palatine de Palerme en Sicile et les enluminures des Cantigas de Sa. Maria, exécutées plus d’un siècle après le Portail de Chartres.
L’arrivée du qanun en Europe via l’Espagne et les croisades est littéralement un contresens répété depuis les traductions trop rapides de textes arabes publiés par Henry George Farmer et le Baron d’Erlanger. Dans ces textes grecs, traduits en arabe à partir du Xème siècle, s’il est bien fait référence au qanun, c’est du monocorde des grecs dont-il est question et non d’une quelconque cithare sur table.
De fait, ce sont les chrétiens qui ont permis la diffusion du psaltérion vers le sud du Bassin Méditerranéen. Dans le monde arabe, seuls les Andalous adopteront les cithares sur table. Ils en agrandiront les dimensions tout en conservant leur préférence pour les cordes de boyau. Mais, l’instrument semble y disparaître assez rapidement et l’on cherche en vain les traces du qanun dans les siècles qui suivent. Le qanun arabe tel que nous le connaissons encore aujourd’hui aurait-il été” réinventé” beaucoup plus tard ?

L’engouement suscité par le psaltérion en Europe à partir du milieu du XIIème siècle suggère la mise au point des cordes métalliques. Arrangées par paires, elles seront d’abord pincées à l’aide de plectres avant d’être frappées à l’aide de bâtonnets, dès les années 1175, comme l’illustre la sculpture de Vermenton.
Ces nouvelles sonorités, limpides et claires jusque dans les suraigües, enrichiront durablement la palette des timbres sonores de l’instrumentarium médiéval.

La Harpe

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LA HARPE

La harpe est un instrument rarissime dans l’iconographie romane sculptée en France. Cette affirmation surprend, mais la plupart des représentations identifiées comme des harpes sont en réalité des rotes. Les documents sont localisés dans l’influence de l’Ile de France, particulièrement chartraine. Toutes ces harpes sont postérieures à 1155. Elles nous parviennent définitivement constituées, sans évolution progressive. Les recherches s’orientent vers les Iles Britanniques pour en déterminer l’origine.

C’est avec une colonne qui la distingue de ses sœurs antiques que la harpe apparaît dans l’iconographie chrétienne. Chargée d’un symbolisme fort, elle jouit très tôt d’un statut particulier qui la rapproche de la musique savante.

Instrument à cordes ouvertes, la harpe autorise tous les systèmes d’accord, laisse son autonomie à la voix et constitue un des chemins de la polyphonie. Elle illustre d’autre part les proportions du monocorde et s’associe à l’enseignement de la théorie musicale. Construite de trois pièces sculptées assemblées par la tension des cordes, c’est un outil presque simpliste et celui qui conserve le plus longtemps la facture archaïque.

Malgré une extrême diversité de formes, la conception des tracés montre que pratiquement, deux types de harpes traversent l’ensemble de la période médiévale : la harpe d’un pied, héritière de l’heptacorde, d’une tessiture d’une octave et la grande harpe, d’environ deux octaves plus bourdons, comportant le plus fréquemment 17 ou 21 cordes.

Sur la fin du Moyen Âge se généralisent les harpions qui augmentent la puissance du son et l’enrichissent en harmoniques. Ce timbre identifie la harpe jusqu’au-delà de la Renaissance et semble provenir de dispositifs plus anciens et plus diffus dans l’espace et dans le temps.

La rote

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LA ROTE

La rote est un instrument très populaire pendant la période romane. Principalement jouée par les jongleurs, elle se trouve aussi dans les mains de David.

Son appellation est débattue. Pierre Bec proposa l’appellation moderne de harpe-psalterion. Christian Rault l’adopte en précisant que le nom médiéval de cet instrument reste une énigme. Lionel Dieu fait remarquer que la dénomination médiévale rote s’applique certainement à cet instrument antérieur à ses descendants : la harpe (même si elle existe dans les Iles Britanniques) et le psaltérion.

Connue des Carolingiens, la « harpe – psaltérion » se présente sous la forme d’un psaltérion triangulaire muni de cordes sur les deux faces. L’instrument se tient comme une harpe, chaque main du musicien agissant sur l’un des plans de cordes en boyau.
Très répandu dans l’ouest de l’Europe du XIe au XIIIe siècle, l’usage de cet instrument a précédé de plus d’un siècle celui de la harpe, notamment au sud de la Loire. La tenue similaire des instruments explique la confusion qui s’est créée chez les musicologues.
On sait peu de choses sur l’usage musical de cet instrument. Associé dans un premier temps à l’image du roi David, il se retrouve aussi dans les mains des boucs et d’ânes musiciens sur les nombreux modillons des églises romanes.